
Asisat Oshoala along with other Super Falcones players celebrating a goal during their WAFCON opener. Photo courtesy: CAF
La WAFCON 2025 suscite l’enthousiasme avec une augmentation de 45 % des prix, une affluence en hausse lors des matchs de la fédération et des investissements audacieux : signes d’un système qui soutient résolument le football féminin. Grâce aux infrastructures, à la visibilité et au soutien qui gagnent du terrain, le football féminin africain entre dans une nouvelle ère attendue depuis longtemps.
Bonface Orucho, agence Bird Story
Un nouveau trophée, une affluence record, une augmentation des prix et un investissement historique pour la Coupe d’Afrique des nations féminine au Maroc, qui a débuté le samedi 5 juillet, reflètent le changement en cours dans le football féminin africain.
Retardée d’un an, entachée par des problèmes de financement et assombrie par des conflits salariaux persistants, la Coupe d’Afrique des nations féminine (WAFCON) a longtemps été à la traîne par rapport à son homologue masculine en termes de soutien et d’ampleur.
L’édition de cette année n’est toutefois pas seulement une compétition de haut niveau, mais aussi une étape importante en termes de reconnaissance.
Selon la Confédération africaine de football (CAF), le montant total des prix a augmenté de 45 % cette année. Les vainqueurs recevront 1 million de dollars américains, soit le double du montant précédent. Plus de 150 000 joueuses sont désormais enregistrées sur le continent, ainsi que près de 8 000 arbitres féminines.
« Ce tournoi ne concerne pas seulement le football. Il concerne la visibilité, la légitimité et l’inclusion économique des femmes africaines dans le sport », a déclaré le président de la CAF, Patrice Motsepe, lors de la cérémonie d’ouverture à Rabat. « Le nouveau trophée reflète non seulement le triomphe, mais aussi la longue lutte pour être reconnues. »
Les fédérations africaines se mobilisent. Au Nigeria, malgré des conflits salariaux non résolus, les Super Falcons entrent dans le tournoi en tant que 11 fois championnes, avec un soutien médiatique accru.
Les Copper Queens de Zambie sont arrivées avec des stars telles que Barbra Banda et Racheal Kundananji, toutes deux fraîchement transférées dans des clubs prestigieux.
Kundananji a fait la une des journaux en février 2024 lorsqu’elle est devenue la footballeuse la plus chère de l’histoire, en signant avec le Bay FC aux États-Unis pour 860 000 dollars américains.
Banda a rejoint l’Orlando Pride dans la NWSL peu après, soulignant encore davantage la demande mondiale pour les talents africains.
Les deux joueuses ont mené la campagne de qualification de la Zambie. Banda a marqué un triplé contre le Cameroun lors d’un match de qualification décisif. Kundananji a ajouté six buts lors des trois derniers matchs.
La Finance Trust Women Super League ougandaise a vu son audience plus que doubler au cours de l’année dernière.
Charmar News rapporte que l’audience des matchs en ligne a bondi après que la Finance Trust Bank ait investi 2 milliards d’UGX (shillings ougandais soit environ 540 000 dollars américains) dans la ligue en août 2024.
Ce parrainage a permis la diffusion hebdomadaire de matchs en direct sur YouTube et Facebook. Les matchs importants attirent désormais entre 50 000 et 100 000 spectateurs, contre moins de 10 000 il y a un an.
Selon NBS Sport, cet accord a également permis de financer la modernisation des infrastructures, la formation des entraîneurs et la réforme des licences des clubs. Le Daily Monitor (quotidien ougandais) note que la fréquentation physique des matchs a également augmenté, les Kampala Queens et She Corporate attirant entre 2 000 et 3 000 spectateurs, contre moins de 500 lors des saisons précédentes.
Les responsables de la FUFA (Féderation des associations ougandaise de football) affirment que le nombre de joueuses enregistrées est passé de moins de 100 en 2014 à plus de 6 500 en 2025, une évolution due à des investissements soutenus et à un intérêt croissant du public.
Certains pays de la région récoltent déjà les premiers fruits du succès de leurs équipes féminines. Les Harambee Starlets du Kenya, par exemple, sont entrées dans l’histoire en février 2025 en battant la Tunisie 1-0 à Sousse. Il s’agissait de leur première victoire en Afrique du Nord en 19 ans, qui leur a permis de se qualifier pour le tour final des qualifications de la WAFCON 2026.
Elles ont continué sur leur lancée lors du championnat CECAFA de juin 2025. Elles ont battu l’Ouganda 4-0, le Burundi 3-0 et le Soudan du Sud 4-0, remportant trois victoires consécutives sans encaisser de but et terminant en tête de leur groupe.
Du côté des jeunes, les Junior Starlets U-17 du Kenya sont devenues la première équipe du pays à se qualifier pour une Coupe du monde de la FIFA. Elles ont obtenu leur place pour la Coupe du monde féminine U-17 2024 en République dominicaine après avoir battu le Burundi 5-0 au total lors du barrage final.
Les pays d’Afrique du Nord renforcent également leurs bases. L’Algérie et la Tunisie ont lancé des académies de base afin de développer le vivier de talents féminins.
Africa Soccer (site internet dédié au footbal en Afrique) rapporte que l’Algérie a ouvert son premier mini-terrain FIFA Arena à Alger en mai 2025. Cette installation fait partie d’un programme de base visant plus de 1 500 enfants, dont des filles, afin de développer l’accès précoce au football.
Cette initiative est soutenue par plus de 4,2 millions de dollars américains provenant du programme FIFA Forward. En Tunisie, la fédération a obtenu 250 000 dollars américains dans le cadre du programme de développement des talents de la FIFA en 2024 afin de renforcer les académies pour filles et la formation des jeunes.
Le pays a également accueilli le tout premier tournoi féminin U-17 de l’UNAF à la fin de l’année 2024, un terrain de recrutement clé pour les talents régionaux.
Le Maroc, en tant que pays hôte, se distingue comme un modèle de développement de l’élite. Le pays accueille la WAFCON pour la deuxième fois consécutive et le fera à nouveau en 2026. Il a lancé cette année une nouvelle académie nationale de football féminin et a nommé Jorge Vilda, entraîneur vainqueur de la Coupe du monde, à la tête de l’équipe nationale.
Les Zambiens Banda et Kundananji sont devenus des icônes pour une nouvelle génération de footballeurs. Leurs parcours, depuis les académies locales jusqu’aux transferts internationaux, illustrent la valeur d’un investissement à long terme.
Les foules à Casablanca et Rabat ont égalé l’énergie des tournois masculins. Les supporters ont rempli les stades de chants, de drapeaux et de peintures faciales.
« Je n’ai jamais vu autant de familles assister ensemble à un match de football », a déclaré Fatima Zahra, une supportrice venue de Fès pour le match d’ouverture. « On a l’impression que c’est notre match maintenant. »
Les lieux de projection publique à Lusaka ont également attiré des milliers de supporters.
« Quand Banda marque, tout le quartier explose de joie », a déclaré Nchimunya Mulenga, une fan de 22 ans. « Elle est plus qu’une athlète, c’est un modèle. »
Le match d’ouverture du tournoi entre le Maroc, pays hôte, et la Zambie a été riche en rebondissements. Le match nul 2-2 a été marqué par des buts de Banda et Kundananji dans la première demi-heure. Le Maroc a réagi avec une discipline tactique et un but égalisateur en fin de match sous la houlette de l’entraîneur Vilda.
Les analystes ont salué la structure et l’équilibre du Maroc.
« Elles ont trouvé un rythme tactique, émotionnel et en termes de cohésion d’équipe », a déclaré Mimi Fawaz, analyste du football africain.
La Zambie a fait preuve de rapidité et de talent, mais a manqué de cohérence dans les transitions au milieu de terrain, un domaine qu’elle doit renforcer pour prétendre au titre.
Le soutien de la CAF est renforcé par le soutien des entreprises, notamment TotalEnergies. La famille royale marocaine a également investi massivement dans les infrastructures sportives, notamment dans le complexe Roi Mohammed VI, d’une valeur de 65 millions de dollars, largement considéré comme l’une des meilleures installations d’Afrique.
La WAFCON sert désormais de tremplin pour des réformes plus larges. La CAF a annoncé qu’elle alternerait chaque année l’organisation des tournois masculins et féminins afin d’accroître la visibilité tout au long de l’année. Des projets sont également en cours pour créer un championnat continental féminin U-17 et élargir la Ligue des champions féminine.
« Nous sommes encore loin de l’égalité, mais des moments comme celui-ci changent la donne », a déclaré l’attaquante marocaine Ibtissam Jraidi. « La question n’est plus de savoir si les femmes ont leur place dans le football africain. Nous sommes là. Nous sommes l’avenir. »
agence bird story
